Michèle Alliot-Marie suspend l'ancien commandant de l'opération Licorne

Publié le par Le Figaro

CÔTE D'IVOIRE Le général Henri Poncet, qui commandait les forces françaises dans le pays jusqu'en juillet dernier, ainsi que deux autres militaires sont suspectés d'avoir «couvert» le décès d'un Ivoirien arrêté par leurs hommes.

Sa suspension se réfère à l'article 44 du Statut général des militaires, qui parle de «faute grave». (Photo AFP.)

Arnaud de La Grange
[18 octobre 2005]

 

Le dossier des relations franco-ivoiriennes, déjà incandescent, n'avait pas besoin de cette nouvelle et triste pièce. L'ancien commandant de l'opération Licorne, le général Henri Poncet, a été suspendu hier soir de ses fonctions par Michèle Alliot-Marie. Lui et deux autres militaires sont soupçonnés d'avoir couvert une bavure de soldats français, ayant entraîné la mort d'un Ivoirien. Les suspensions ont été prononcées pour «manquements graves à la loi, aux règlements militaires et aux ordres».


Les faits remontent au 17 mai 2005. A l'époque, dans l'ouest de la Côte d'Ivoire et à l'intérieur de la «zone de confiance», des soldats français arrêtent un Ivoirien. Plutôt qu'un combattant d'une des factions rebelles, l'homme serait un «coupeur de routes», auteur de plusieurs viols et meurtres. Il «décède de ses blessures» quelques heures après son arrestation.


L'affaire rebondit le 11 octobre dernier. «Nous avons recueilli des informations faisant peser un doute sur les circonstances de ce décès, explique-t-on au ministère de la Défense. Il est en particulier établi qu'il n'a pas été rendu compte à l'époque des faits aujourd'hui mis à jour.» Dès le lendemain, ces informations sont transmises au procureur de la République. Et, parallèlement, est ouverte une enquête de commandement, dont les conclusions devraient être rendues dans quelques jours. Pourquoi suspendre aussi rapidement un général «quatre étoiles» – fait rarissime –, sans attendre plus d'éléments ? «C'est une mesure conservatoire, qui n'entame pas la présomption d'innocence», répond-on. Mais l'on indique aussi que si le ministre de la Défense a pris cette décision, c'est que «les faits d'ores et déjà recueillis apparaissent suffisamment graves».


Le général de corps d'armée Henri Poncet a quitté le commandement de l'opération française en Côte d'Ivoire cet été. Il était, depuis, en poste à Bordeaux, à la tête de la Région militaire Sud-Ouest. Avec lui, deux autres militaires sont suspendus : le chef du corps du 13e BCA (bataillon de chasseurs alpins), le colonel Burgaud, ainsi que le sous-officier commandant la section en cause, qui appartient à une autre unité de la Brigade alpine. Leur suspension se réfère à l'article 44 du Statut général des militaires, qui parle de «faute grave».


Au ministère de la Défense, on souligne que ces faits ne remettent pas en cause la qualité de la mission remplie par les 50 000 soldats français qui se sont relayés depuis trois ans en Côte d'Ivoire. Et l'on fait remarquer que l'on ne badine pas avec les faux pas. Déjà, dans l'affaire du cambriolage d'une banque ivoirienne par des soldats français, Michèle Alliot-Marie avait jugé les peines infligées en première instance «insuffisantes».


Mais cette affaire fait surface dans un contexte extrêmement tendu, alors que la Côte d'Ivoire s'apprête à plonger dans un trou noir institutionnel, le mandat du président Gbagbo expirant fin octobre sans que des élections soient organisées. La semaine dernière, Michèle Alliot-Marie avait fait état de «provocations» contre les forces françaises. Ceux qui à Abidjan dénoncent leur attitude «coloniale» devraient faire leurs choux gras de cette fâcheuse histoire.

Publié dans L'armée française

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