Côte d'Ivoire: Communiqué final du sommet de prétoria
Communiqué final du sommet de prétoria
A linvitation du Médiateur de lUnion africaine, Son Excellence Monsieur Thabo Mbeki, Président de la République Sud-africaine, une rencontre des leaders politiques ivoiriens a eu lieu à Pretoria du 3 au 6 avril 2005. Ont pris part à cette rencontre, Son Excellence Monsieur Laurent Gbagbo, Président de la République de Côte dIvoire, le Premier ministre Seydou Elimane Diarra représentant le Gouvernement de Réconciliation nationale, lancien Président Henri Konan Bédié, représentant le Parti démocratique de Côte dIvoire (PDCI), lancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara représentant le Rassemblement des républicains (RDR), et le ministre dEtat Guillaume Soro, Secrétaire général des Forces nouvelles. La rencontre était présidée par le Président Thabo Mbeki.
Les leaders ont passé en revue la situation actuelle de la Côte dIvoire et ont pris des décisions relativement aux problèmes rencontrés dans la mise en uvre des Accords de Linas-Marcoussis, Accra II et III. Les leaders ivoiriens ont réaffirmé :
leur attachement aux Accords de Linas Marcoussis, dAccra II et III;
leur attachement à la feuille de route élaborée par le Médiateur de lUnion africaine ;
leur attachement à toutes les résolutions des Nations unies sur la Côte dIvoire ;
leur attachement au respect de la souveraineté, de lindépendance, de lintégrité et de lunité de la Côte dIvoire ;
leur volonté quant à la nécessité dorganiser lélection présidentielle en octobre 2005 et les élections législatives qui suivront ;
leur volonté commune et sincère de créer un climat politique propice à linstauration rapide dune paix durable ;
limportance quils accordent à la résolution de la crise ivoirienne dans lintérêt du peuple ivoirien, de la sous région Ouest-africaine et de lAfrique dans son ensemble.
Déclaration commune de fin de Guerre
Les parties ivoiriennes signataires de lAccord de Pretoria, par le présent accord déclarent la cessation immédiate et définitive de toutes les hostilités et la fin de la guerre sur tout le territoire national. A cet effet, elles rejettent, sans équivoque, lusage de la force comme moyen de résolution des divergences. Elles ont également reconnu que la guerre a entraîné une souffrance et une misère indescriptibles au peuple ivoirien. La guerre a aussi conduit à une détérioration de léconomie de la Côte dIvoire avec des conséquences négatives pour la sous région ouest africaine. Les leaders ivoiriens, par le présent accord, réaffirment le droit sacré du peuple ivoirien à la paix et au développement.
Le Médiateur réitère sa désapprobation et sa condamnation quant aux violations du cessez-le-feu du 4 au 6 novembre 2004 et du 28 février 2005 ainsi que des violences du 6 au 9 novembre 2004 ; il appelle toutes les parties et le peuple ivoirien en général, à uvrer ensemble pour éviter des incidents violents et la guerre.
Désarmement et Démantèlement des milices
Les parties signataires du présent accord se sont accordées pour procéder immédiatement au désarmement et au démantèlement des milices sur lensemble du territoire national.
Le Premier ministre du Gouvernement de Réconciliation nationale est chargé de conduire cette opération de désarmement et de démantèlement des milices en élaborant un plan daction ainsi que sa mise en oeuvre.
Le Président de la République, Son Excellence Monsieur Laurent Gbagbo, Chef de lEtat, Chef suprême des Armées et Président du Conseil supérieur de la Défense désignera à cet effet, des unités des Forces de Défense et de Sécurité chargées dassister le Premier ministre dans sa mission de désarmement et de démantèlement des milices.
Ces unités des Forces de Défense et de Sécurité mises à la disposition du Premier ministre seront assistées des Forces impartiales.
Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (DDR)
Il a été convenu que les chefs détat-major des Forces armées nationales de Côte dIvoire (FANCI) et des Forces armées des Forces nouvelles (FAFN) se rencontrent immédiatement en vue de sassurer de la mise en uvre du Plan national de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (PNDDR).
A ces deux chefs détat-major, se joindra une équipe dexperts désignés par la médiation.
Ces chefs détat-major ont également reçu mandat de formuler des recommandations spécifiques afin de refonder une armée attachée aux valeurs dintégrité et de moralité républicaine et de procéder à la restructuration des forces de défense et de sécurité tels que stipulés au paragraphe 3 (f) de lAccord de Linas Marcoussis. Ces recommandations devraient être soumises au gouvernement de réconciliation nationale.
Pour répondre aux préoccupations exprimées par les parties signataires de cet accord, les Forces de Défense et de Sécurité et les Forces Armées des Forces nouvelles ont convenu de se retrouver dès le jeudi 14 avril 2005 à Bouaké. Cette importante rencontre qui aura lieu en présence du Premier ministre marquera la reprise des contacts entre les FANCI et les FAFN ainsi que la reprise du processus DDR.
Sécurité dans la zone sous responsabilité des Forces nouvelles :
Les parties signataires du présent accord ont admis la nécessité de garantir la sécurité des biens et des personnes dès le début de lopération de cantonnement des Forces nouvelles dans le Nord suivant les mesures temporaires et transitoires énumérées ci-après :
Six cents (600) éléments des FAFN seront recrutés et formés suivant les critères nationaux de la Gendarmerie et de la Police en vigueur. Ces éléments recevront une formation accélérée par la section de la police de lONUCI. Ces éléments seront déployés aux côtés des Forces de lONUCI. Dès que ladministration de lEtat sera rétablie sur lensemble du territoire national, les intéressés devront poursuivre leur formation à lécole de police et de gendarmerie en vue de leur intégration dans le corps de la police nationale ou celui de la gendarmerie nationale.
Sécurité des membres du Gouvernement issus des Forces nouvelles
Les parties signataires du présent accord ont accepté le plan pour la sécurité des ministres du Gouvernement de Réconciliation nationale issus des Forces nouvelles, proposé par la Médiation.
En conséquence, les Forces nouvelles acceptent de réintégrer le Gouvernement de Réconciliation nationale.
Délégation des pouvoirs au Premier ministre
Il a été convenu que le Premier ministre du Gouvernement de Réconciliation national a besoin dune autorité exécutive nécessaire pour accomplir convenablement sa mission.
Il est convenu que la délégation des pouvoirs dont jouit le Premier ministre est suffisante pour lui permettre daccomplir sa mission conformément à lAccord de Linas Marcoussis.
En conséquence, le Président de la République réaffirme lautorité du Premier ministre.
Commission Electorale Indépendante
Les parties signataires du présent accord conviennent dapporter les modifications quant à la composition, lorganisation et le fonctionnement de lactuelle Commission électorale indépendante (CEI):
Composition et fonctionnement de la Commission centrale de la CEI :
Deux (2) représentants nommément désignés par chaque partie signataire de lAccord de Linas Marcoussis dont six (6) pour les Forces nouvelles;
Seuls ont voix délibérative: les représentants des parties signataires de lAccord de Linas Marcoussis ainsi que le représentant du Président de la République et celui du Président de lAssemblée nationale.
Un nouvel amendement sera proposé au Parlement pour permettre à toutes les parties de désigner leurs représentants à la CEI.
Composition et fonctionnement du Bureau de la Commission centrale :
Les membres du bureau de la Commission centrale sont élus par la Commission centrale ;
Le bureau de la Commission centrale comprend douze (12) membres et se décompose comme suit :
Un (1) représentant de chaque partie signataire de lAccord de Linas Marcoussis soit un total de dix (10) membres ;
Un (1) représentant du Président de la République ;
Un (1) représentant du Président de lAssemblée nationale.
Mandat des membres de la Commission centrale :
Le mandat des membres de la Commission centrale prend fin à lissue des élections générales.
Organisation des élections
Les parties signataires du présent accord sont conscientes des difficultés et sensibilités liées aux élections.
En vue dassurer lorganisation délections libres, justes et transparentes, elles ont admis que les Nations unies soient invitées à prendre part aux travaux de la Commission électorale indépendante. A cet effet, elles ont donné mandat au Médiateur, Son Excellence Monsieur Thabo Mbeki, dadresser une requête aux Nations unies, au nom du peuple ivoirien, en vue de leur participation dans lorganisation des élections générales.
Les parties demandent que la même requête soit adressée aux Nations unies en ce qui concerne le Conseil constitutionnel. Les Nations unies doivent sassurer à ce que leur mission dintervention sollicitée soit appuyée par un mandat et des pouvoirs appropriés à laccomplissement de leur mission.
Composition du Conseil dadministration de la Radio Télévision Ivoirienne (RTI)
La RTI est une institution importante qui doit être utilisée pour favoriser lunité et la réconciliation nationale.
En conséquence, ses émissions doivent couvrir immédiatement lensemble du territoire national. Il a aussi été décidé de restituer à la RTI le statut dont elle jouissait avant le 24 décembre 2004.
Les décrets n° 2004-678 du 24 décembre 2004 et n° 2005-01 du 04 janvier 2005 seront rapportés immédiatement.
Par ailleurs, le ministre dEtat Guillaume Soro en relation avec le Premier ministre, présentera au Président de la République un projet de décret portant nomination des membres du Conseil dadministration de la RTI.
Nouvelle saisine de lAssemblée nationale
Les parties signataires du présent accord prennent acte de la détermination de la médiation en ce qui concerne ladoption des textes issus de lAccord de Linas Marcoussis.
Elles donnent mandat au Premier ministre afin quil instruise les ministres en charge délaborer les projets de loi concernés en vue de les soumettre à ladoption de lAssemblée nationale.
Les signataires du présent Accord invitent tous les députés de la nation à soutenir ces amendements dont ladoption est prévue au plus tard pour la fin du mois davril 2005.
Financement des Partis politiques
Les signataires du présent accord ont admis détendre le principe du financement des partis politiques aux partis politiques non représentés au Parlement, en raison du contexte politique qui a prévalu par le passé.
Eligibilité à la Présidence de la République
Les participants à la rencontre ont discuté de lamendement de larticle 35 de la Constitution. Ayant écouté les points de vue des différents leaders ivoiriens, le Médiateur sest engagé à se prononcer sur ce sujet après avoir consulté le Président de lUnion africaine, Son Excellence le Président Olusegun Obasanjo, et le Secrétaire général des Nations unies, Son Excellence Kofi Annan. La décision issue de ces consultations sera communiquée aux leaders ivoiriens. Le médiateur fera diligence pour régler cette question.
Code de bonne conduite
Les parties signataires ont convenu, pour lintérêt de la paix en Côte dIvoire, du rapprochement entre les leaders politiques ivoiriens. Cette action doit se poursuivre après la réunion de Pretoria. Les parties conviennent, compte tenu de la gravité et de la persistance de la crise en Côte dIvoire, de la nécessité de poursuivre le processus de réconciliation nationale au-delà des élections.
Interprétation de laccord
En cas de différence dinterprétation sur tout ou partie du présent accord, les parties signataires du présent accord conviennent de sen remettre à larbitrage du Médiateur.
Motion de remerciement
Les parties ivoiriennes signataires de lAccord de Pretoria expriment leur profonde gratitude à Son Excellence Monsieur Thabo Mbeki, Président de la République Sud-africaine, Médiateur de lUnion africaine, pour son engagement personnel dans la résolution de la crise ivoirienne, au Gouvernement et au peuple Sud-africains, pour le dévouement, laccueil chaleureux et lhospitalité quils leur ont réservés et qui ont contribué au rapprochement des leaders politiques ivoiriens en vue de la consolidation de la paix et la poursuite du processus de réconciliation nationale en Côte dIvoire.
Le Médiateur exprime sa sincère appréciation pour lengagement des leaders ivoiriens pour une résolution rapide de la crise ivoirienne.
Fait à Pretoria le 6 avril 2005
S.E.M Laurent GBAGBO
Président de la République de Côte dIvoire
S.E.M Thabo MBEKI
Président de la République Sud-africaine
Médiateur de l`Union Africaine
S.E.M Seydou Elimane DIARRA
Premier Ministre du Gouvernement de Réconciliation Nationale
Pour le PDCI
M. Henri Konan BEDIE
Pour le RDR
M. Alassane Dramane OUATTARA
Pour les FN
M. SORO Guillaume
Fait à Pretoria le 6 Avril 2005