Pourquoi Christiane alias Nzinga Taubira fait-elle peur aux Socialistes ?

Publié le par Afrikara.com

 
19/12/2005

Christiane Nzinga Taubira, femme noire députée de Guyane, ancienne et brillante candidate à l’élection présidentielle de 2002, grande première dans l’ancien empire colonial français, inquiète semble t-il sérieusement «son» camp d’affiliation, les socialistes français. Selon le Nouvel Observateur*, Jean-Marc Ayrault le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale « ne cache pas son inquiétude à propos de l’influence de Christiane Taubira, … dont il redoute la dérive communautariste ». Conséquence, les socialistes ont préféré mettre en avant dans le débat sur l’abrogation de la loi nostalgique sur colonisation Victorin Lurel, député socialiste de Guadeloupe, supposément plus républicain.

 

Cette option bassement politicienne des hiérarques socialistes traduit une fois de plus l’incapacité de sortir d’une vision instrumentale des Minorités dites visibles, noires en particulier lorsqu’il s’agit pour elles d’avoir une exposition médiatique « octroyée » par la discipline d’un camp. Car en effet peu incarnent, autant que Christiane Nzinga Taubira, sur l’échiquier politique français actuel, le combat pour une histoire coloniale et républicaine expurgée de son amnésie cardinale. Au lieu que le mérite et l’infatigable travail de terrain et de fabrication d’un champ politique généreux et inclusif soient reconnus et mis au meilleur service des délibérations parlementaires, les socialistes, dans des arithmétiques vaseuses d’apothicaires ont préféré, préfèrent tabler sur des tactiques sans lendemain…

 

 

L’essentiel est probablement ailleurs que dans la discussion parlementaire dont le résultat était du reste sans suspense, mais tout entier dans les batailles qui vont être menées autour des présidentielles de 2007. Pour les partis de gauche, le parti socialiste aura en toile de mire de limiter l’impact électoral de ses alliés traditionnels afin d’éviter un trop grand éparpillement des voix. Le traumatisme du 21 avril 2002 est encore présent dans tous les esprits, lorsque le candidat socialiste Lionel Jospin s’était fait sortir au premier tour, plongeant son camp et les praticiens des habitudes de la machine électorale dans le trouble. Un certain nombre de voix s’étaient alors élevées pour insinuer que les 2,3% de suffrages héroïques gagnés par la campagne pétillante et intelligente de la députée de Guyane avaient fait défaut au candidat socialiste, précipitant la défaite de toute la gauche jetée dans l’alternative cornélienne entre la droite et l’extrême droite au second tour.

 

 

Il y a donc fort à parier que Christiane Nzinga Taubira, dont la candidature impérieuse donnerait une visibilité et une crédibilité énormes aux frémissements politiques et de regroupement des Noirs de France autour du minimum commun des exclusions ethniques du droit économique, social, politique de cité, essuiera des manœuvres passablement inamicales de « son » camp d’ici à 2007.

 

L’influence grandissante de Nzinga Taubira, son discours mobilisateur sur l’effectivité de sens des valeurs de la république comme espace d’égalité, ouvert à l’existence de communautés que les simplificateurs ne veulent voire qu’à l’aune des replis identitaires -en dépit de l’existence d’associations et communautés blanches dynamiques, arméniennes, portugaises, juives, arabes, d’espaces urbains chinois, …-, seraient un prétexte pour la confiner à un  espace lilliputien.

 

Or il ne fait guère de doutes que repousser les limites d’une nation dont la colonisation, l’impérialisme ont été et sont une partie de l’histoire, une part de l’être, de l’âme, de l’imaginaire, devra se faire, dans l’intérêt de la république aussi par l’intrusion de toutes les sensibilités françaises jusqu’aux charges politiques les plus éminentes. La question est dès lors non de savoir si Christiane Nzinga Taubira devrait être candidate, mais sous quelle étiquette politique et selon quelle stratégie d’investiture. En l’absence de partis et mouvements politiques autres que les grandes écuries susceptibles de porter cette candidature naturelle des différences de la république, il sera probablement difficile de faire sans les grandes familles de droite ou de gauche.

 

Christiane Nzinga Taubira devra alors définir une stratégie de jeu par laquelle elle forcera la porte de « son » camp [son talent y pourvoit largement mais cela ne suffira pas], d’autant que dans cette partie où patte blanche sera exigée, elle devra ne point s’aliéner les voix de la communauté qui se portent déjà à elle.

 

Cet exercice d’équilibrisme politique justifie peut-être certaines initiatives surprenantes auxquelles son nom a été associé, et peut-être tactiquement Christiane Taubira devra t-elle diluer un moment sa verve et la substance de celle-ci. A son électorat peut-être de comprendre à des moments critiques, le prix que doit payer un leader irréprochable dans son engagement, pour une émancipation collective.

 

   

 

 

* : http://www.nouvelobs.com/rubriques/p2144/Evenement.html

 

 

Afrikara

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P
La présidence du Groundland est heureuse de vous souhaiter un joyeux Noel et une longue à votre blog<br /> http://www.boosterblog.com/groundland
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