Togo : la main de la France dévoilée - Coup d’Etat

Publié le par Christian Bailly-Grandvaux

Togo : la main de la France dévoilée - Coup d’Etat
 
Le Courrier d'Abidjan - 2/14/2005 5:04:49 AM
 
Les chefs d’Etat africains et le peuple togolais en sont persuadés : la «succession» anticonstitutionnelle togolaise est l’œuvre des réseaux parisiens. Quelques informations inédites participent à l’accréditation de cette thèse…

Progressivement, les ombres chinoises qui dansaient à Lomé depuis le samedi 5 février s’effacent et cèdent la place à quelques certitudes que recouvrent tout de même quelques mystères entêtants. De confidences en recoupements, les vérités s’imposent, et une fois de plus, l’arrivée de la lumière n’est pas à l’avantage de la France officielle et de ses différents apprentis-sorciers. Elle montre également l’ampleur de la guerre des longs couteaux qui se livre en ce moment au sein du sérail créé par l’ex-président togolais…
Révélations sur la mort d’Eyadéma. Les circonstances de la mort du président togolais Gnassingbé Eyadéma n’ont jamais fait l’objet de commentaires excessifs. Toutefois «Le Courrier d’Abidjan» est en mesure de révéler qu’il est décédé le samedi 5 février aux alentours de midi, et non plus tôt comme certains le pensaient. De quoi ? Mystère total. Sauf que dans les salons feutrés de Lomé, et dans de nombreuses chancelleries, l’on affirme désormais avec beaucoup de certitude que le «Vieux» a été bel et bien assassiné. Il a été, dit-on, empoisonné il y a maintenant plus d’un an, en même temps que son tout-puissant fils Ernest, qui était lieutenant-colonel dans son armée et «tenait» d’une main de fer certaines unités, plus précisément la puissante garnison paracommandos de Kara (la ville d’origine de la «dynastie»). Ernest était vu comme un probable successeur à «l’homme au totem faucon». Il a été évacué à Paris quasiment au moment où son père décédait. Bon à savoir : Gnassingbé Eyadéma, jusqu’à son dernier souffle, a catégoriquement refusé d’être évacué en France, persuadé que son «ami personnel» Jacques Chirac le trouvait décidément trop encombrant ces derniers temps.
L’Afrique ne doute plus : derrière Faure, il y a la France. Au fur et à mesure que les jours passent, une certitude s’installe dans l’esprit des présidents africains et dans la conscience du peuple togolais : la main invisible qui fait s’agiter les marionnettes du théâtre qui se déroule entre Lomé et Pya (le village d’origine des Gnassingbé) est celle de la France. Les subtiles virevoltes de Paris, qui demande désormais que Faure Gnassingbé, qu’elle reconnaît implicitement, tienne les vagues promesses d’ouverture que son père a laissées pendantes, irritent le cénacle pourtant très tempéré des chefs d’Etat africains. On chuchote, on murmure. Au cœur de la prise du pouvoir de Faure, il y a eu deux «coopérants», dont les noms seront sans doute bientôt «balancés». On évoque également Charles Debbasch, ancien professeur de droit à l’Université d’Aix (aimablement qualifié de «repris de justice» par les mauvaises langues depuis qu’il a été emprisonné en France dans le cadre d’un scandale financier), «tailleur de constitutions» attitré à la Pierre Mazeaud, dignitaire de la droite française, qui a tout goupillé, jusqu’à être personnellement présent à l’Assemblée nationale lors de la «mascarade constitutionnelle». Selon nos sources, lors de la dernière réunion de Niamey, où les esprits étaient très échauffés, la France a été clairement mise en cause, et par des personnes au rôle central au sein de l’Union africaine. Les relations déjà exécrables entre un Thabo Mbeki par exemple (il a une fois de plus, dans son discours sur l’Etat de la Nation, dénoncé «une mascarade anticonstitutionnelle), et Jacques Chirac, ne vont pas sans doute pas s’améliorer…
Par ailleurs, les Togolais ne sont pas dupes et ont d’ores et déjà compris que Paris jouait contre la démocratie dans son pays. «Vous avez vu ce qui s'est passé en Côte d'Ivoire... Eh bien nous on en a assez au Togo! Si les Français ne nous aident pas, on va égorger les Français qui se trouvent ici. On est chez nous, nous aussi on a droit à la démocratie», disait par exemple un jeune manifestant samedi à Lomé. Une image qui a été reprise par les banques d’images internationales et a été diffusé dans de nombreux journaux télévisés dans le monde (France 2 a tout de même expurgé son reportage de ces phrases qui rappelle l’échec ivoirien et interroge les magouilles de la Françafrique). Ces propos «guerriers» de ce jeune togolais ne sont en tout cas, que l’expression paroxystique de l’indignation d’un peuple qui a toléré pendant 38 ans les compromissions de tous les gouvernements français avec Gnassingbé père et qui comprend que les autorités hexagonales soutiennent aujourd’hui Gnassingbé fils.


Par Sylvie Kouamé

Publié dans Francafrique

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