Mme Alliot-Marie: La grande menteuse à la tête de « la grande muette »

Publié le par Jean Bellus

Mme Alliot-Marie: La grande menteuse à la tête de « la grande muette »
Après avoir expliqué au peuple français que les manifestants ivoiriens tués autour de l’hôtel Ivoire l’ont été suite « à des bousculades » ; après avoir reconnu, dans un deuxième temps, qu’il y avait eu des morts par balles (cela devenait difficilement contestable tout de même quand on savait qu’il y avait eu décapitation par balle de gros calibre — Mme Alliot-Marie trouvait pourtant « outrancier » que le président Gbagbo le dise) ; après avoir donc reconnu des morts par armes mais pour attribuer misérablement cela à l’armée ivoirienne ; après tous ces atermoiements, la ministre française de la défense, à la tête de « la grande muette », selon ce surnom étrange de l’armée française, vient enfin, du bout des lèvres, de concéder la vérité : les militaires français ont fait — la formule est élégante ! — « usage total de leurs armes ». Vrai porte parole de l’armée française, celui-ci, un soldat qui ne comprend pas ce qu’on lui fait faire en a pleuré, rapporte le colonel Georges Guiai Bi Poin, selon l’ AFP (Abidjan, 28 nov 04). Et les choses se précipitent : aujourd’hui les Français découvrent que leur armée a mitraillé pendant 5 heures, tirant 300 obus, les manifestants du pont De-Gaulle !
Et les médias français, qui ont tu jusque là ce qu’ils n’ont pourtant pas pu ignorer, de stigmatiser la presse ivoirienne, et d’en appeler à la liberté de la presse d’ « opposition » ! Quand les Ivoiriens se font tirer dessus par l’armée française, qu’il est héroïque, depuis un bureau parisien, de stigmatiser le rejet par ces mêmes Ivoiriens de médias qui, sous le charmant intitulé d’ « opposition », appellent la France à taper plus fort ! 3000 blessés entre le 6 et le 9 novembre 2004 selon le CICR qui ne veut « pas donner de précisions sur le nombre de morts ni sur les causes des décès, "afin de ne pas jeter d'huile sur le feu" », selon l’AFP (Genève, 22 nov - 18h10) — morts et blessés que la grande menteuse a dû finalement reconnaître comme étant consécutifs à des tirs de l’armée française. 3000 blessés et un nombre de morts que pour l’instant, on se refuse à préciser ! Cela ne suffit sans doute pas ! Et on fait mine d’ignorer en France que le gouvernement Gbagbo s’escrime à ne pas restreindre la liberté de la presse. Quand le pouvoir ivoirien maintient donc le pluralisme de la presse (sans même l’auto-censure — si ce n’est que cela — de la presse française) ; quand il laisse dans les kiosques des titres d’ « opposition » le traitant de « fasciste », au lieu de le féliciter à juste titre d’octroyer cette liberté en temps de guerre, on veut lui faire grief de ce qu’il n’a pas fait. Et pourtant que ne lui suggèrent pas plusieurs, qui disent : en temps de guerre est-il raisonnable de laisser dire cela ? Alors certes, quand on est à l’abri on peut y trouver à redire, mais c’est tout de même dans ce contexte de guerre que quelques-uns sont passés à l’acte contre des journaux et des médias, qui d’une seule voix — en sept ou neuf exemplaires (minimum) — s’accordent pour refuser ce qui fut le verdict des urnes en faveur de Gbagbo, et se gardent bien de dire une parole sur les exactions commises au vu et au su de l’armée française dans les zones occupées. Une seule voix qui rassemble aujourd’hui depuis Bédié (l’inventeur de l’ « ivoirité », alors soutenu par Paris) jusqu’à Ouattara (allié à présent à ce même Bédié pour dénoncer ce concept que Gbagbo n’a jamais retenu), en passant par les rebelles !

« Quels sont les médias de la haine ? »
Mais c’est contre Gbagbo et la presse qui le soutient que l’on se déchaîne. Il est piquant de la part des autorités françaises et des médias qui leur font docilement écho, de parler de « médias de la haine » concernant la presse patriote, quand on sait que le moyen imparable qu’elle a utilisé en Côte d’Ivoire pour susciter la colère des Ivoiriens a été tout simplement de publier in extenso les articles des journaux français — avec pour seul commentaire : article repris de tel journal français (sous-entendu : voilà ce qui est dit de nous) ! Quels sont les médias de la haine ? Je me souviens de la Une vipérine de Libération au lendemain de la mort de Jean Hélène (reproduite dans la presse ivoirienne), tandis qu’était reléguée à la rubrique des faits divers la bavure policière qui la même semaine valait la mort d’un jeune Arabe dans le Sud-Ouest de la France. Qui se souvient même de son nom ?

Mais on a décrété que Gbagbo a la rage ! — selon le vieil adage utilisé aujourd’hui comme hier : « qui veut tuer son chien l’accuse de la rage ».
Ne comprend-on pas que les médias d’ « opposition », quand ils répercutent les appels à la France à taper plus fort ne font que susciter la colère en Côte d’Ivoire ? Pensons aux propos de Chirac qui, dans cette situation, ose dire (Le Monde du 16.11.04) que « les Africains sont joyeux par nature », ou à la répartie scandaleuse d’Alliot-Marie qui trouve « outrancier » de parler de décapitations d’Ivoiriens par les balles de l’armée française, mais apparemment pas outrancier que cela se soit fait : cela ne risque-t-il pas susciter une légitime colère ?

« Honte à vous, médias français »
Médias de la haine ? Parlons des radios et TV : ceux qui les écoutent savent qu’on y trouvait —pendant qu’Alliot-Marie faisait mine de les inviter à cesser les « appels à la haine » — essentiellement des appels aux dons de sang pour les blessés et de nourriture pour ceux qui siégeaient nuit et jour pour protéger le Président, qu’ils ont démocratiquement élu, d’une nouvelle récidive de tentative de coup d’État (par une armée française à visage découvert, après qu’ait été tenté la rébellion interposée – qui a trouvé ses armes où ? –, les manœuvres marcoussiennes, onusiennes, etc.). Est-ce soigner ses blessés et résister qui est haineux ? Ou guetter le moindre dérapage verbal d’un peuple dont on nie jusqu’aux souffrances ?
Honte à vous, médias français, qui d’une seule voix (qu’il est donc inutile pour le pouvoir de faire taire) font résonner la parole d’une France, qui comme toujours, sous prétexte d’ « ethnisme » — la rage de son chien — (pouvez-vous même concevoir qu’un Africain fasse de la politique ?), massacre tout ce qui s’oppose à ses nostalgies d’Empire (« retrouver l’esprit de conquête » annonçait Chirac à l’insu de notre vigilance lors de sa dernière campagne électorale). Tout cela sous les louanges d’une presse unanime, même prétendue d’ « opposition »… Toujours le même prétexte, depuis le génocide des Bamileke du Cameroun par l’armée française dans les années 50-60, jusqu’à la Côte d’Ivoire aujourd’hui, en passant par le Nigeria – Biafra, le Togo, les deux Congo, le Rwanda, etc. Toujours le même panneau dans lequel vous tombez : comment votre bonne conscience ne soutiendrait-elle pas une France qui prend la pose anti-raciste pour imposer son ordre raciste ?
Vous qui avez répercuté à tout va les paroles de Français en Côte d’Ivoire sauvés des pillages (4000 prisonniers lâchés dans la foule par ladite « opposition », qui s’est vu octroyer la charge de la prison par l’accord de Marcoussis !). Vous qui avez répercuté à l’envi leurs paroles selon lesquelles plusieurs ont été sauvés par la fraternité de leurs « gardiens » noirs contre les patriotes — ne voyez-vous pas que pour beaucoup ils sont patriotes eux-mêmes, ces « gardiens » ? (« Gardien » comme traduction politiquement correcte de « boy ».) Vous qui nous avez tiré des larmes en ne vous intéressant qu’à l’exil des Français, et qui n’avez pas osé ni voulu nous dire la souffrance des Ivoiriens en proie à une violence que vous nous taisiez — pourrez-vous entendre l’interpellation du Français blanc que je suis, et oser enfin témoigner des faits avant que tous ne les sachent ? Si vous aviez dit ces faits dès le 6 novembre, si vous aviez dénoncé les tirs depuis les hélicoptères au lieu de les taire, le massacre du 9 novembre, (commis en nos noms de Français — en mon nom de Français — et contre la conscience de nos militaires comme ce marsouin en larmes) aurait peut-être été évité ! Saurez-vous enfin être autre chose que des médecins après la mort ?

Jean Bellus

Publié dans Francafrique

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