«La France arme les rebelles à partir du Tchad» - Révélations

Publié le par Christian Bailly-Grandvaux

«La France arme les rebelles à partir du Tchad» - Révélations
 
Le Courrier d'Abidjan - 2/15/2005 3:54:08 AM
 
L’Américain Gary K. Busch, expert en intelligence et co-auteur de «La guerre de la France contre la Côte d’Ivoire» fait de détonantes révélations et livre des analyses sur la vraie stratégie de bataille de Paris et des rebelles.

Une fois de plus, Gary K. Busch, le spécialiste en intelligence américain qui avait pour la première fois établi – dans un article figurant dans l’ouvrage collectif «La guerre de la France contre la Côte d’Ivoire» – comment l’armée française avait soutenu les rebelles en 2002 et qui avait dénoncé leurs circuits d’armement (ce qui n’a jamais été démenti ni officiellement ni officieusement), va faire parler de lui.
Il vient de resurgir dans le débat politique ivoirien au moment où Paris torpille la médiation du président Thabo Mbeki. Au-delà des analyses percutantes qu’il fait dans son dernier article paru sur son site Internet ocnus.net (et qui seront considérées avec intérêt dans le monde du renseignement international), il livre des révélations explosives sur le soutien persistant de Paris aux hommes de Guillaume Soro, malgré l’embargo.
Après avoir cité tous les caprices des «Forces nouvelles» qui vont de l’exigence de porter des armes lors du Conseil des ministres à celle d’avoir au moins dix gardes de corps de leur bord en passant par la fameuse «délégation de pouvoirs» à Seydou Diarra, Gary K. Bush est désormais sûr d’une chose : «Il est clair que les rebelles ne veulent pas voir avancer le processus de paix. Les marmottements de Soro au sujet de la sécession portent la signature de son tuteur politique, le Burkinabè Blaise Compaoré et c’est la seule idée politique qu’ils aient jamais eue. La semaine dernière, les rebelles ont annoncé qu’ils allaient restructurer leur présence militaire dans leur zone. Le premier pas est la nomination du Sergent Issiaka Ouattara comme adjoint au chef d’Etat-major, le Colonel Soumaïla Bakayoko. Ces décisions ont été endossées par Konaté, et non Soro. Pis, les rebelles ont annoncé qu’ils mettaient en place leur propre école de police près de Bouaké, dont l’objectif est de former environ 600 jeunes qui formeront une nouvelle police et une administration douanière.»
Après avoir dressé le tableau d’une rébellion dont les débuts ont été cafouilleux avant «son alimentation par la France et le soutien de soldats burkinabé à Korhogo et Bouaké, qui se déplaçaient en vêtements civils», ainsi que des rescapés des conflits libériens et sierra-léonais, Gary K. Busch fait une importante révélation sur le soutien en armements que continue d’apporter Paris au MPCI et à ses satellites. «Il est clair que les rebelles sont toujours soutenus par les Français et le Burkina Faso. De nombreux témoignent au sein des cercles de l’aviation africaine attestent d’un réapprovisionnement des rebelles à travers le Tchad (peut-être à partir du Darfour). Selon ces pilotes le dernier avion avec des armes pour les rebelles a atterri le 20 janvier au Tchad. En l’absence de toute industrie, agriculture ou autres sources de revenus dans le nord, il n’est pas très difficile de voir que «quelqu’un» soutient le rythme de vie des rebelles.» Difficile de nier de manière catégorique les informations de Gary Busch lorsqu’on sait qu’aucun mécanisme de surveillance du Burkina Faso et des autres plateformes des trafics d’armes du MPCI, ni même des frontières nord de la Côte d’Ivoire, ne garantit l’efficacité de l’embargo côté rebelle.
Après avoir donné cette très précieuse information, Gary Busch – qui trouve «absurde» la «leçon de Chirac à Mbeki sur comment penser comme un Africain» – analyse la politique de blocage de tout mouvement qu’a adoptée la coalition franco-rebelle. «L’objectif des rebelles et des Français est de retarder tout mouvement vers la réconciliation. Aussi longtemps qu’il n’y aura pas de paix, les Français peuvent être raisonnablement sûrs que les autres pays vont hésiter à faire des investissements substantiels en Côte d’Ivoire. Sinon, quand les compagnies coloniales françaises, comme Bouygues-Saur ou Total, essaient d’élargir leur emprise sur les projets-clés en matière d’infrastructures, elles se rendent compte qu’il y a des compagnies venues d’ailleurs qui ont l’intention d’augmenter leurs prospections sur les réserves ivoiriennes de pétrole et de gaz, et qui s’intéresseront à la centrale d’électricité d’Azito qui doit bientôt être renouvelée. Les Français et les rebelles qu’ils supportent sont sûrs qu’ils pourront s’éterniser dans leur attitude actuelle jusqu’à après octobre de cette année, où une élection présidentielle est requise par la Constitution. Entretemps, ils vont traîner les pas, se défiler et repousser tout mouvement positif qui pourrait résoudre la question de la réunification du pays. Si rien ne se passe, les Français vont gagner.»
A travers cette mise en garde, l’expert américain en intelligence – qui travaille actuellement dans le domaine de l’aviation, ce qui lui permet d’être informé de nombreux trafics d’armes – encourage le camp Gbagbo, mais surtout les pays qui n’ont pas intérêt à ce que la France perpétue sa mainmise sur l’Afrique francophone, à imaginer des stratégies qui permettront d’implémenter le référendum et les élections générales. Pour la Côte d’Ivoire, l’heure n’est pas à l’attentisme. La France a choisi la stratégie du pourrissement, il est urgent de la contrer.

Par Sylvie Kouamé

Publié dans Francafrique

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